Publié sur :
http://blogs.mediapart.fr/blog/philippe-alain/061012/des-enfants-pourchasses-violentes-et-humilies-par-la-police
Des enfants pourchassés, violentés et humiliés par la police
06 octobre 2012 Par philippe alain
Arrestations violentes, menottage, chantage, absence d’avocat,
palpations intimes … Certains policiers s’acharnent contre les enfants
des rues au lieu de les protéger.
« Enlève ton soutien-gorge, mets les mains contre le mur et écarte les jambes »:
Maria et Monika (1) ont respectivement 14 ans et 12 ans. Alors
qu’elles sont dans la gare de Lyon Part Dieu en cette fin de juillet
ensoleillée, elles sont interpellées par 2 policiers et conduites au
poste de police. C’est devenu de la routine. Le Président de la
République a changé mais ni les préfets ni les procureurs. Les consignes
sont les mêmes depuis le discours de Grenoble de Sarkozy et la course
aux chiffres continue, il faut interpeller tout ce qui bouge et
particulièrement les enfants qui font la manche pour survivre. Au poste
de police, on leur demande de vider leurs poches et de décliner leur
identité. La maman de Monika qui passe devant le poste voit sa fille et
rentre pour la réclamer. En guise de réponse, on lui demande son
passeport où figure l’identité de l’enfant, un policier en fait une
photocopie, lui rend et lui ordonne fermement de partir sans lui donner
aucune indication sur le sort réservé à sa fille. A ce moment là, la
police est donc parfaitement au courant de l’âge de Monika et sait
qu’elle a 12 ans. Un policier passe alors un coup de fil et l’attente se
prolonge. Au bout d’une trentaine de minutes, un autre policier attrape
les enfants par les bras et les emmène vers une voiture pour les
conduire à l’hôtel de police. Maria témoigne : « Il me serrait fort par
le bras. Quand je lui ai dit qu’il me faisait mal, il a serré encore
plus fort. »
Arrivés à l’hôtel de police, rue Marius Berliet, les enfants
descendent de voiture : « Le policier nous a demandé si on avait de
l’argent sur nous. J’ai dit que non. Il m’a dit que si jamais sa
collègue en trouvait, il nous mettrait en garde à vue. (NDLR : la garde à
vue est interdite sur les mineurs de moins de 13 ans) On a marché
quelques mètres et il a recommencé à me demander si j’avais de l’argent
sur moi. Il m’a dit que c’était mieux de le donner tout de suite sinon,
il y aurait des problèmes. Je ne sais pas pourquoi, il m’a demandé
plusieurs fois si j’avais de l’argent sur moi en répétant que si je ne
le donnais pas, il me mettrait en garde à vue. » Une fois dans le
bâtiment, les deux enfants sont amenés dans une salle : « une grande
salle avec des murs sales et des mégots par terre. La porte, en fait,
c’était une grille avec des barreaux qui s’ouvrait et se fermait en
glissant. »
Ce qui se passe ensuite est assez ahurissant. Le récit s’appuie sur
le témoignage écrit de Maria, 14 ans. Il est livré tel quel, la scène
s’étant déroulée sans témoin:
« Ils sont venus prendre ma copine et je suis restée seule dans la
salle. Une femme policier en uniforme est arrivée. Elle était brune,
elle avait une queue de cheval, des yeux noirs et des gants blancs. Elle
m’a dit bonjour, je lui ai dit bonjour. Elle m’a dit d’enlever mon
t-shirt, j’ai enlevé mon t-shirt. Ensuite, elle m’a demandé de retirer
mon soutien-gorge. J’ai enlevé mon soutien-gorge. Elle l’a regardé dans
tous les sens et puis elle l’a posé sur un banc. Je lui ai demandé si je
pouvait me rhabiller. Elle m’a dit que non, que je pouvais juste
remettre mon soutien gorge. Ensuite, la femme policier m’a dit de me
tourner, de mettre les deux mains contre le mur et d’écarter les jambes.
J’avais une jupe courte. Elle a relevé la jupe jusqu’au dessus de ma
culotte et elle a commencé à mettre ses deux mains sur mon mollet et à
remonter. Elle a continué à me tapoter la peau avec ses deux mains en
remontant, la jambe, le genou, la cuisse.
Quand elle a mis sa main au niveau de mon sexe, j’ai sursauté
tellement j’étais surprise, j’ai dit : aïe, vous me faites mal, madame,
j’ai mes règles. Elle m’a dit : je m’en fous, j’ai des gants. Elle a du
sentir que j’avais une serviette hygiénique parce que moi, j’ai bien
senti sa main. Ensuite elle a recommencé avec l’autre jambe. Depuis le
bas, jusqu’en haut. C’était insupportable. A la fin, elle m’a dit, c’est
bon, tu peux te rhabiller. Je n’ai toujours pas compris pourquoi elle
avait fait ça. Ca se voyait que j’avais rien sur moi. C’est comme si
elle cherchait quelque chose sous ma peau… »
L’histoire sordide se terminera quelques heures plus tard par une
audition. «Un policier en civil m’a emmené dans un bureau. Il m’a
demandé où j’habitais, comment s’appelaient mes parents, où ils étaient.
Il m’a demandé si les autres policiers m’avaient mis des menottes. J’ai
dit que non. C’était long. Le papier faisait 2 pages. A la fin, il m’a
dit de signer. Je ne savais pas ce qui était écrit. J’ai juste vu
écrit : procès verbal. J’ai signé, je n’avais pas le choix. Après, on
est allé chercher ma copine. Elle ne voulait pas signer la feuille. Ils
lui ont dit que si elle ne signait pas, ils ne la laisseraient pas
sortir. A la fin, elle a signé.»
Plus de 3 heures après avoir été interpellées à la gare de la
Part-Dieu, les deux jeunes filles sortent donc de l’hôtel de police,
relâchées dans la nature. Monika, 12 ans, aurait simplement subi une
palpation sur tout le corps, y compris les seins, mais pas de mise à
nue. Maria elle, est sortie très choquée. A aucun moment leurs parents
n’ont été prévenus, elles n’ont vu ni médecin, ni avocat.
Selon une source policière qui souhaite garder l’anonymat,
l’absence de médecin et d’avocat serait normale car les enfants « n’ont
pas été contraints ». Ils seraient « venus de leur plein gré » pour une
« audition libre ». En ce qui concerne la fouille à nu, c’est
impossible, selon la police, car interdit depuis mai 2011.
Menotté à 12 ans, le bras en sang :
Quelques jours auparavant, une autre histoire impossible s’était
produite, mettant encore une fois en cause le comportement de certains
policiers. Le récit des événements s’appuie sur le témoignage de
l’enfant et de différents témoins.
Roman (1) a 12 ans. Il fait la manche dans le métro en fin
d’après-midi quand il aborde une passante qui le repousse. Probablement
surpris par la réaction de la femme et se sentant agressé, il la pousse
également et lui donne une tape au moment où elle se retourne pour
partir. La main de l’enfant atterrit sur la partie postérieure de la
dame. L’histoire aurait pu s’arrêter là. L’enfant n’a pas eu ce qu’il
voulait et la femme a courageusement repoussé une tentative d’extorsion
de quelques centimes par un enfant des rues qui faisait appel à sa
générosité. Mais en réalité, l’histoire ne s’arrête pas là. Elle ne fait
que commencer.
A l’affût comme des chasseurs de gros gibiers, 3 policiers en civil
surgissent et se précipitent sur l’enfant. Roman n’est pas vraiment un
colosse. Il est même plutôt petit pour son âge. Il mesure 1m40 et pèse
45 kilos. Un de nos héros policiers sauveur de dame en détresse saute
courageusement sur Roman et le projette contre un portillon en verre
sécurit qui explose sous le choc. L’enfant a le bras en sang. Toute la
scène est filmée par les caméras de surveillance. L’un des témoins
raconte : « J’ai vu les policiers le traîner dans un coin à l’abri des
regards. Beaucoup de sang coulait par terre. Un des policiers est parti
en courant et les autres ont emmené le gamin derrière la porte qui donne
sur les taxis. » Des copains de Roman essayent de pousser la porte pour
rester près de lui. Ils sont violemment repoussés par les policiers qui
se sentent probablement en grand danger face à deux enfants d’une
quinzaine d’années. Les policiers mettent alors les menottes à Roman.
Son bras ruisselle de sang, des traces sont encore visibles sur le sol
plusieurs jours après les évènements. Ils le conduisent au poste de
police de la gare.
Ouf, mission accomplie pour nos gardiens de la paix. On est
impatient de lire le rapport de police et leur version des faits.
Pourquoi pas accuser le gamin d’agression sexuelle et de violences ?
Qu’est ce qu’ils ne feraient pas pour gonfler les statistiques… La
course aux chiffres devait disparaître, mais comme pour beaucoup de
choses, le changement, c’est pas pour maintenant… Au poste de police,
les policiers refusent d’abord à la famille de rentrer et puis ils
laissent finalement passer la mère. Elle en ressort le passeport
déchiré. A cet instant, les policiers connaissent l’âge de Roman et
doivent donc en principe connaître également les procédures à respecter.
Face à la blessure de l’enfant qui continue de saigner, les pompiers
sont appelés et procèdent aux premiers soins. Puis les policiers
décident de conduire l’enfant à l’hôtel de police sous les yeux de sa
mère en larmes. La maman témoigne : « les policiers ont donné un coup de
pied dans ma poussette avec le bébé et ils ont emmené mon fils avec les
menottes et en le tenant par la gorge. Ils m’ont dit : dégage, ferme
là… »
A l’hôtel de police, Roman est placé dans la salle de garde à vue.
Ici encore, les parents ne sont pas prévenus et pour cause, les
policiers venaient d’écarter violemment la mère pour ne pas qu’elle
reste avec son fils quelques instants auparavant. Ici encore, aucun
avocat n’est appelé, ce qui constitue une violation des droits de
l’enfant. Cette fois, en revanche, en ce qui concerne le médecin, on ne
peut pas reprocher aux policiers d’avoir négligé l’aspect médical
puisqu’ils décident de conduire l’enfant aux urgences. Les policiers
déclarent alors au médecin que l’enfant s’est blessé en tapant dans un
vitre. Ils ressortent de l’hôpital avec une radio rassurante du bras et
un certificat médical qui disparaîtra mystérieusement du dossier. Au
milieu de la nuit, les policiers emmènent Roman dans un foyer pour
mineurs en disant qu’il a été trouvé à la rue, sans ses parents. Ses
parents eux, paniqués, ne dormiront pas de la nuit, ne sachant pas où se
trouve leur fils. Le lendemain ils retrouveront Roman traumatisé qui
parle très peu. Son corps porte les stigmates de l’interpellation
violente dont il a fait l’objet la veille: son avant bras est entouré
par un large pansement et son poignet est noirci par les traces des
menottes.
Plus de 4 jours après les faits, un médecin constate :
« l’avant-bras présente au tiers moyen des plaies en cours de
cicatrisation et des ecchymoses du derme profond. Le poignet est aussi
porteur de plaies en cours de cicatrisation et porteur de traces de
striction. L’enfant se plaint d’avoir été très serré dans des
menottes. »
La loi, pourtant très claire, est violée:
L’article 4 de l’ordonnance n° 45-174 du 2 février 1945 relative à
l'enfance délinquante, récemment modifiée par les lois Perben I et II
est le texte de référence concernant la garde à vue ou la mise en
retenue des enfants mineurs. (2)
Avant 10 ans, aucune mesure de retenue n’est possible sur un enfant.
Entre 10 ans et 13 ans, l’enfant ne peut être placé en garde à vue,
mais il peut être « retenu », on appréciera la nuance, pour les besoins
d’une enquête. Pour être retenu, il faut 2 conditions. La première est
que le mineur soit soupçonné d’un crime ou d’un délit que la loi punit
d’une peine d’au moins 5 ans de prison. Par exemple un vol avec
violences ou une agression sexuelle. La seconde condition est qu’un
magistrat: juge ou procureur de la république autorise la mise en
rétention de l’enfant. L’enfant peut alors être retenu 12 heures,
renouvelables une fois. Dans le cas où les deux conditions contre le
mineur sont réunies et que la mesure de retenue est appliquée, elle doit
forcément être accompagnée de 3 mesures: les parents doivent être
immédiatement prévenus, un médecin doit examiner l’enfant afin de
s’assurer que son état de santé est compatible avec la rétention et
enfin, un avocat soit s’entretenir avec l’enfant.
Entre 13 ans et 16 ans, la garde à vue est possible, y compris
quand le mineur est soupçonné d’une simple infraction. Les conditions
sont à peu près les mêmes que pour l’enfant de moins de 13 ans, à ceci
près que l’avocat n’est obligatoire qu’à la demande de l’enfant ou de
ses parents. La loi est également très claire en ce qui concerne les
auditions des enfants. Les interrogatoires des mineurs placés en garde à
vue font l'objet d'un enregistrement audiovisuel.
Le chantage à la garde à vue pour contourner la loi
Lors de la réforme de la procédure de la garde à vue, on se
rappelle tous de la levée de boucliers des syndicats de police qui nous
expliquaient en substance que la présence d’un avocat dès le début des
gardes à vue allait compliquer leur travail. Et bien, ils ont trouvé la
parade… Elle s’appelle l’audition libre.
L’audition libre est une procédure sans contrainte au cours de
laquelle une personne est entendue par les services de police. Plus
besoin de notifier la mise en placement, plus besoin de notifier de
droits, plus besoin de médecin, plus besoin d’avocat. C’est magique,
non ? Lors d’une interpellation, les policiers procèdent donc souvent à
un chantage pour contourner la loi et les garanties que le législateur a
voulu donner aux citoyens. Le chantage est simple : soit vous nous
suivez volontairement pour une audition libre, soit vous refusez et nous
vous mettons en garde à vue. Sauf que… Dans les cas des 3 enfants, il y
a bel et bien violation de la loi. Pour un mineur de moins de 13 ans,
en dehors d’une procédure de vérification d’identité, ce qui n’était pas
le cas puisqu’une copie des papiers d’identité était en possession des
policiers, on est forcément dans le cadre d’une procédure de retenue. Et
lorsqu’on procède à la retenue d’un mineur de moins de 13 ans… On
rentre dans le cadre de l’article 4 de la loi du 2 février 45 modifiée
par la loi du 4 avril 2011. Par conséquent, les parents auraient dû être
prévenus de la retenue, les enfants auraient dû être vus par un médecin
et ils auraient dû s’entretenir avec un avocat.
Pour Maria, qui elle a moins de 15 ans, l’absence de contrainte et
le fait qu’elle soit venue « de son plein gré » est totalement
contradictoire avec ses déclarations. Elle est formelle, elle a été
emmenée à la voiture de police tenue par le bras et donc contrainte et
forcée. La police pourrait prétexter pour elle qu’il s’agissait d’une
mesure de vérification d’identité, mais alors pourquoi avoir procédé à
une mise à nu partielle et à une fouille à même la peau ? S’agirait-il
d’une nouvelle technique pour vérifier l’identité d’un mineur ? D’autre
part, à qui fera-t-on croire que deux filles de 12 ans et 14 ans se sont
rendues de leur plein gré à l’hôtel de police de Lyon en plein
après-midi ? Vous imaginez le tableau ? Tiens, on ne sait pas quoi
faire, on s’embête un peu, il n’y a pas école, et si on allait faire un
tour à l’hôtel de police pour se faire palper à nu par une femme
policier… Enfin, le cas de Roman est pire encore puisqu’il a été menotté
et emmené par un policier qui le tenait par une clé de bras autour du
cou. Si ça, ce n’est pas de la contrainte, il faudra nous expliquer.
Décidément, la police possède un langage bien à elle qui n’est pas
vraiment le même que celui du simple citoyen.
La mise à nu et les palpations des parties intimes
Les cas de mises à nu abusives se sont multipliés ces dernières
années. On rappellera simplement quelques exemples comme celui de ce
couple de retraités de 70 ans convoqué à un commissariat et dont la
femme « a dû se déshabiller complètement, sous-vêtements compris, tandis
que son mari a été palpé en slip et en t-shirt. » (3) Ou encore cet
homme de 63 ans arrêté pour défaut de permis de conduire et fouillé à nu
3 fois. (4) Même si depuis juin 2011, un arrêté (5) précise que la
fouille intégrale avec mise à nu complète est interdite, il existe un
lourd passif concernant le recours abusif des fouilles à nu par des
policiers. Dans un rapport publié en janvier 2012 concernant les
contrôles d’identité à l’encontre des jeunes issus des minorités, Human
Rights Watch dénonce certaines pratiques policières notamment à Lyon:
« Ils nous touchent de plus en plus les parties intimes », témoigne
un jeune homme. L’organisation internationale regrette notamment
l’absence de règles spécifiques concernant les palpations corporelles
sur les enfants. (6)
En ce qui concerne le témoignage de Maria, la police niera
peut-être tout en bloc, à moins qu’elle ne joue sur les mots en parlant
de mise à nu partielle et donc autorisée. Il restera néanmoins à
expliquer les palpations à même la peau car les déclarations de jeune
fille sont très choquantes. S’il ne s’agissait pas d’un policier, on
pourrait parler à minima d’attouchements à caractère sexuel. D’autre
part, quel est l’intérêt pour la police de procéder à des palpations sur
les jambes de l’enfant, en partant des mollets et en remontant jusqu’à
l’entrejambes à même la peau ? De nombreux autres cas de palpations à
même la peau ont également été recensés. Une palpation sert à s’assurer
que rien n’est dissimulé, non ? Sur une chemise, un jean, un pantalon,
cela à un sens, mais à même la peau ? Quel est donc le but poursuivi par
les policiers lors de ces palpations ?
Mais au-delà de ces questions, ce qui est profondément choquant et
inadmissible, c’est qu’en France, dans un pays démocratique qui vient
d’élire un président socialiste, un citoyen et à fortiori un enfant
mineur puisse se retrouver seul dans une salle avec un policier qui lui
demande de se déshabiller et que ce dernier puisse procéder à des
palpations sur son corps, à travers des vêtements ou à même la peau,
sans personne pour contrôler ce qui se passe. Ni médecin, ni avocat, ni
même aucun autre témoin. Combien de mineurs ont-ils été ainsi palpés,
touchés, humiliés ? Combien de plaintes ont été déposées ? De quels
moyens les parents disposent-ils pour prouver la véracité des faits
avancés par leurs enfants ? C’est parole contre parole… Et on sait ce
que cela signifie face à un fonctionnaire de police assermenté.
La méconnaissance du code de déontologie de la police :
En juin 2012, le Défenseur des Droits a remis son rapport à
François Hollande. Il fait état de violences policières persistantes:
menottage systématique, insultes, brutalités entraînant parfois la mort.
Alors que le nombre global de dossiers reçus dans les quatre domaines
d’activité du Défenseur a baissé de plus de 3 %, les plaintes concernant
la déontologie de la sécurité ont explosé avec une augmentation de
96 %. (7)
Garde à vue qui ne dit pas son nom et masquée par une prétendue
audition libre à laquelle on emmène les enfants manu militari, usage des
menottes sur un enfant de 12 ans, mise à l’écart des parents, fouille à
nu partielle, palpations à même la peau, obligation faite aux enfants
de signer des procès verbaux qu’ils ne comprennent pas, absence
d’avocat, absence d’examen médical, absence d’enregistrement video des
auditions… En plus d’une violation de la loi pour certaines d’entre
elles, toutes ces dérives constituent très clairement une violation du
code de déontologie de la police qui précise notamment dans son article
10: « Toute personne appréhendée est placée sous la responsabilité et la
protection de la police ; elle ne doit subir, de la part des
fonctionnaires de police ou de tiers, aucune violence ni aucun
traitement inhumain ou dégradant. » (8) Cet article précise en outre:
« Le fonctionnaire de police qui serait témoin d'agissements prohibés
par le présent article engage sa responsabilité disciplinaire s'il
n'entreprend rien pour les faire cesser ou néglige de les porter à la
connaissance de l'autorité compétente.»
Ironie de l’histoire, le code de déontologie de la police date du
18 mars 1986. Elle est signée par un certain Laurent Fabius, Premier
Ministre de l’époque et Pierre Joxe, Ministre de l’Intérieur. 26 années
se sont écoulées depuis. Laurent Fabius est à nouveau en responsabilité
aux plus hautes fonctions de l’Etat. Quant à Pierre Joxe, il exerce une
activité d’avocat spécialisé dans le droit des enfants. On espère qu’ils
se pencheront, ainsi que le gouvernement, sur ces exemples qui ne sont
ni des exceptions, ni l’apanage de la police. Dans un article mis en
ligne en septembre 2012, Louise Fessard dénonce également dans Médiapart
les pratiques illégales de certains gendarmes contre des enfants roms.
(9)
On imagine l’effet destructeur de ce genre de traitement sur des
enfants qui subissent des traumatismes à la fois physiques et
psychologiques. Ces pratiques sont d’autant plus scandaleuses qu’elles
sont commises par des agents dépositaires de l’ordre public et visent
des enfants qui devraient être protégés plutôt que pourchassés,
violentés et humiliés.
Après l’affaire Neyret à Lyon, celle des policiers de Vénissieux
mis en examen pour corruption, les fonctionnaires de la BAC écroués à
Marseille pour vol, racket et trafic de drogue, il y a vraiment des
pratiques à revoir de toute urgence au sein de la police française.
(1) Les prénoms ont été modifiés
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire