Publié sur http://www.rue89.com/rue89-culture/2013/09/18/grece-stupeur-apres-lassassinat-rappeur-antifa-killah-p-245819
Le rappeur grec Pavlos Fyssas, connu sous le nom de scène Killah P, a été tué par un militant néonazi affilié à l’Aube Dorée, dans la nuit de mardi à mercredi à Athènes, devant un café d’un quartier populaire du Pirée.
Le rappeur grec Pavlos Fyssas, connu sous le nom de scène Killah P, a été tué par un militant néonazi affilié à l’Aube Dorée, dans la nuit de mardi à mercredi à Athènes, devant un café d’un quartier populaire du Pirée.
L’artiste, connu pour son engagement dans le mouvement antifasciste,
est décédé dans la nuit à l’hôpital de Tzanio, des suites de ses
blessures à l’arme blanche. L’annonce de sa mort a jeté la stupeur en
Grèce.
Affrontements entre antifas et policiers
Alors qu’une partie du service public était en grève
et défilait calmement ce mercredi dans plusieurs villes grecques pour
protester contre la réforme de l’administration et l’austérité
budgétaire qui touchent de plein fouet les fonctionnaires, des
manifestations antifascistes se sont organisées en mémoire du rappeur.
Sur les lieux du drame à Athènes (5 000 personnes selon un
photographe de l’AFP) mais aussi à Salonique (environ
6 000 manifestants) et Patras, les manifs ont rapidement tourné à
l’affrontement avec les forces de l’ordre. Une foule de vidéos
témoignent de la violence des heurts.
Heurts à Athènes, le 18 septembre 2013
Heurts à Salonique, le 18 septembre 2013
A Athènes, des renforts de police ont contenu tant bien que mal les
débordements, selon l’agence de presse grecque ANA. A Salonique et
Patras, la police a répliqué aux jets de pierres et de bouts de bois par
des tirs de gaz lacrymogène.
Nikos Smyrnaios, maître de conférence en sciences de l’information et de la communication (en France), s’inquiète sur son blog
d’une « escalade possible » et relaie une vidéo devenue virale sur les
réseaux sociaux depuis cette nuit, témoignant, selon son auteur, de
l’infiltration de policiers en civil et militants d’extrême droite dans
les cortèges.
Vidéo postée dans la nuit de mercredi à jeudi
« Quinze à vingt fascistes »
Pour rappel, le site indépendant EnetEnglish
rapportait ce mercredi qu’« un groupe de quinze à vingt fascistes,
portant des T-shirts noirs, des bottes et pantalons militaires,
déployés » dans la rue, aurait hélé le rappeur de 34 ans, qui se
promenait alors avec sa petite amie et un autre couple.
L’agresseur présumé a été appréhendé peu après par la police, selon l’AFP.
Après avoir sommé sa femme de jeter sa carte du parti, retrouvée peu
après par la police, l’homme de 45 ans a reconnu appartenir au parti
néonazi de l’Aube dorée (7% des suffrages aux dernières législatives) et
avoir agi avec un motif politique.
Le parti fasciste, connu pour ses attaques racistes
et dont plusieurs députés sont poursuivis pour violence, dément toute
implication. Mais avoir nié l’affiliation du meurtrier au mouvement, il a
fini par la reconnaître.
Morceau de Killah P
Dans un climat social extrêmement tendu, Petros Constantinou, leader du parti anticapitaliste Antarsya, dénonçait
peu avant sur la radio Skai la passivité des agents de police présents
non loin des lieux de l’altercation, passivité confirmée par un témoin
de la scène, dont la version des faits a été relayée sur le site
indépendant Okeanews.
Aux apostrophes adressées au Premier ministre conservateur Antonis Samaras pour l’exhorter à condamner officiellement l’assassinat, ont répondu les appels au calme du président Carolos Papoulias :
« J’en appelle à un réveil social et institutionnel, à la volonté politique de lutter contre cette ignominie. Nous avons tous le devoir de ne pas laisser les portes ouvertes au fascisme. »
Daniel Cohn-Bendit réagit
Le chef du groupe des Verts au parlement européen, Daniel Cohn-Bendit, réagissait peu avant ça à la mort du rappeur par voie de communiqué, et dénonce « la menace mortelle pour la démocratie grecque » qu’est devenue Aube dorée :
« Il faut que l’Union européenne comprenne, après l’assassinat commis par Aube dorée, qu’un changement radical de la politique européenne en Grèce est nécessaire. Face à une population désespérée, l’émergence d’un fascisme meurtrier menace non seulement la stabilité de la société grecque, mais aussi de l’UE. Ce meurtre abject ne fait que renforcer la décomposition sociale en Grèce. Il est temps que nous, Européens, nous nous réveillions avant qu’il ne soit trop tard. [...]Il faut que le gouvernement réagisse vigoureusement en arrêtant le coupable, et en étudiant sérieusement la possibilité d’interdire Aube dorée, écartant le risque de toute complaisance avec une organisation meurtrière. »
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