mardi 17 juin 2014

Brésil : Pourquoi nous crions « IL N'Y AURA PAS DE COUPE DU MONDE » ?

Ci-dessous un texte des Camarades brésiliens du Front Populaire Indépendant de Rio de Janeiro sur le mouvement de protestation contre la Coupe du Monde au Brésil. Deux vidéos également : une première très intéressante avec des interviews de manifestants et manifestantes, qui montre bien la contradiction qui existe entre les riches et les pauvres au Brésil ; et une autre de solidarité envoyée par les Camarades de Montpellier impliqués dans le Football Populaire.

Un site à aller voir pour une actualité brésilienne du point de vue du peuple : A Nova Democracia et le blog AND Blog.

La Cause du Peuple




 



Pourquoi nous crions « IL N'Y AURA PAS DE COUPE DU MONDE ? »

Le football est le sport de la multitude ; un sport qui donne les passions les plus intenses aux gens du monde entier. Nous ne nions pas l'importance du football pour le peuple brésilien et même le rôle du sport et des loisirs dans la société. Cependant, la Coupe du Monde de la FIFA n'est pas seulement un événement sportif.

Le cri « NÃO VAI TER COPA - IL N'Y AURA PAS DE COUPE DU MONDE » est apparu dans les rues pendant le soulèvement populaire de juin 2013, quand des milliers de personnes de différentes villes du pays se sont battus pour de meilleures conditions de vie et de travail. Crier « IL N'Y AURA PAS DE COUPE DU MONDE » c’est être contre le pouvoir économique absolu et ses intérêts dans les décisions politiques, qui doivent être déterminées par le peuple et axées uniquement sur ses besoins réels. Nous ne pouvons pas fermer les yeux sur les crimes commis au nom de la Coupe du Monde. Faire taire « IL N'Y AURA PAS DE COUPE DU MONDE », c'est trahir les pauvres, c'est trahir la lutte contre les inégalités sociales. C’est TRAHIR les rues!

Pourquoi nous crions « IL N'Y AURA PAS DE COUPE DU MONDE » ?



EXPULSIONS

Au nom de la Coupe du Monde et des Jeux Olympiques, les expulsions illégales et les violations flagrantes des droits de l'homme ont été et sont commises. Des communautés entières ont été et sont rayées de la carte, mettant fin à la vie de milliers de personnes.

Les déplacements génèrent la douleur, la tristesse, l'abandon et la mort. L'ensemble du processus est de la torture. Du graffiti pour marquer les maisons (ce qui ressemble à des pratiques nazies) qui seront démolies, l’abjecte pression - avec intimidation et menaces - des fonctionnaires de la SMH (Secretaria Municipal de Habitação - Secrétariat Municipal du Logement) jusqu'à l’expulsion par la force, souvent avec la police brandissant des armes à feu pour sortir les gens de leurs propres maisons.

L'État Bourgeois brésilien, connu comme un État démocratique, nie le droit de chacun à des conditions de vie adéquates, suffisantes pour garantir à elle / lui-même et son / sa famille l'essentiel des services sociaux indispensables à la dignité humaine - santé, éducation, assainissement urbain, le transport et le LOGEMENT. Le droit à la ville est complètement nié par l'Etat bourgeois.

La Coupe du Monde reproduit l'exclusion sociale et raciale. Approfondit les problèmes sociaux et environnementaux jamais résolus.
Plus de 250 000 familles ont été déplacées et/ou vivent sous la menace d’être déplacées. Les dépenses pour la Coupe du Monde au Brésil franchissent la barre incroyable des 30 milliards de réals (pour l'instant) [près de 9,8 milliards d’euros]. En comparaison, la somme des trois dernières Coupes du Monde atteind 25 milliards de dollars.

ÉNORMES DÉPENSES PUBLIQUES ET ELEPHANTS BLANCS

Que sont les éléphants blancs ? Ce sont d’extrêmement coûteux, énormes, mais aussi de COMPLETEMENT INUTILES travaux. En parler populaire, c’est le fameux « jeter de l'argent par les fenêtres ».

Les stades de Brasilia, Cuiaba, Manaus et Natal ne seront pas prêts pour moins de trois milliards de réals au total. La subvention sera financée par la BNDES et les gouvernements des États, qui sont des compositions de fonds publics, donc notre argent.

Le stade Mané Garrincha à Brasilia, par exemple, a une capacité de 71 000 personnes. La contradiction saute aux yeux quand on regarde le public du premier match de la finale du championnat brésilien de l'an dernier : 1956 spectateurs. Le même scénario se répète dans les trois autres villes mentionnées.

A Manaus, l'absurdité est encore plus grande ! Le Groupe de contrôle du système pénitentiaire (Grupo de Monitoramento e Fiscalização do Sistema Carcerário), lié à la Cour d'Amazonas (Tribunal de Justiça do Amazonas), a émis l'hypothèse de transformer le stade nouvellement construit en une « prison » temporaire.

La réforme du Maracanã a coûté près de deux milliards de dollars et seulement trois matchs de la Coupe du Monde s’y joueront. Il a été dépensé plus d’argent que pour la construction d'un nouveau stade ! Le nouveau stade, maintenant une « arène », a effacé l'identité historique du Maracanã. Les supporters et même les joueurs de l'équipe nationale espagnole et italienne ont eu ces sentiments lorsqu’ils sont entrés dans le nouveau stade : « Où est le public ? », « Il est très européen », « Comme les autres stades, il a perdu sa mystique… ».



LES OPPRESSIONS DE RACE ET DE GENRE

La Coupe du Monde de la FIFA joue les anciennes pratiques sexistes et encourage la marchandisation du corps.

Un exemple en est les T-shirts vendus par Adidas, l'une des multinationales qui parrainent ce méga-événement. Sur les t-shirts sont imprimées des fesses de femmes, une allusion grossière pour renforcer l'oppression des femmes et, en particulier, les agressions sexistes quotidiennes contre les femmes brésiliennes.

Ajouté à cela, il y a le racisme : la FIFA est muette sur de nombreux cas de racisme dans les championnats d'Europe et du monde ; un couple a été rejetée par la FIFA, avec l'appui du gouvernement, de présenter le tirage au sort pour la Coupe du Monde parce qu’ils sont Noirs, avec le discours que le couple ne répondait pas aux « normes européennes ».

La Coupe du monde ne fera que développer les sites de cyber-séduction qui profitent du marché de l'exploitation sexuelle. En Afrique du Sud, par exemple, le nombre estimé a augmenté de 100 à 140 milliards au cours du méga-événement 2010.

Le Brésil a l'un des niveaux les plus élevés de l'exploitation sexuelle des mineurs dans le monde. Il y a de plus en plus de rapports d'exploitation sexuelle, y compris des enfants et des adolescents autour des stades et des grands travaux d'urbanisme de la Coupe du monde, qui a révélé, par exemple, que des filles âgées de 11 à 14 ans se prostituent dans la région d’Itaquerão, Zone Est de São Paul.

ELITISIME = SEGREGATION DANS LES STADES

Les nouveaux stades ou arènes, le restent juste au niveau de l'apparence. Dans la pratique, il y a un effet secondaire tragique en cours : les coûts des nouvelles « arènes » (payées avec l'argent public, donc notre argent) sont intégrés dans le prix des billets, qui deviennent plus chers, créant une élitification du football. Ceci est le résultat de la privatisation des espaces publics - entreprises capitalistes qui ne cherchent que leur profit en acquérant le contrôle des espaces publics.

Les supporters traditionnels, la classe ouvrière, la même qui a construit les stades ou arènes, sont privés de leurs droits : un travailleur ne peut pas se permettre un billet qui coûte autant que 50% (ou plus) du salaire minimum.

Une étude récente a montré que les billets du Championnat brésilien en cours dans les nouvelles arènes sont en moyenne 119% plus chers que dans l'ancien stade.

REPRESSION

Plus inquiétant que la campagne orchestrée pour discréditer ceux qui critiquent la Coupe du Monde est le mouvement orchestré par l'État brésilien pour développer l'appareil répressif visant à étouffer les protestations lors du méga-événement - et plus probablement, après.

Ce mouvement a agi sur deux fronts : législatif et apparent (militaire et policier). Les projets de loi qui visent à créer le délit de terrorisme au Brésil créent des failles juridiques de sorte que le pouvoir judiciaire puisse incriminer les mouvements sociaux et les manifestants comme des terroristes.

Le gouvernement fédéral envoie maintenant des troupes fédérales à Rio de Janeiro en disant qu'ils contiendront le trafic de drogue. Le trafic a toujours existé, n’a jamais pris fin. Pourquoi maintenant ? Il s'agit d'une action des gouvernements (fédéraux, des états et municipaux) pour justifier l'arrivée des troupes fédérales, l'aide à l'invasion de favelas, dans l’installation ou l'amélioration de l'UPP [Unités de Police de Pacification], l'élargissement du domaine et de la répression de l'État et l'augmentation du profit capitaliste puisque la première action de l'Etat est d'ouvrir la porte aux entreprises privées pour obtenir de nouveaux clients.

Dans un contexte d'indignation et de manifestations, les forces répressives augmentent avec l'objectif d'étouffer, de réprimer et de contrôler les luttes populaires, en particulier les soulèvements qui ont eu lieu dans les bidonvilles, lieux de divers foyers de résistance. En outre, c’est dans les bidonvilles que les pauvres et les Noirs sont persécutés, torturés et assassinés.

Ce qui est arrivé à Manguinhos était plus qu'une révolte populaire ! Une centaine de familles ont occupé un entrepôt (vide) derrière la bibliothèque Parque de Manguinhos. La police militaire a tenté de retirer de force les familles. Face à la résistance des habitants, la police a tiré des gaz lacrymogènes et des grenades assourdissantes ; la population a répondu par une grêle de pierres et de bouteilles. Ensuite, la police a commencé à tirer avec des armes à feu. Plusieurs personnes ont été blessées. Quatre jeunes gens ont été tués. Un est dans un état grave. Il s'agit de la criminalisation de la pauvreté et des mouvements sociaux, des luttes et des occupations.



MANIFESTATIONS

Avec autant d’arbitraire, de violations des droits de l'homme, de procédures d'exclusion sociale complètes, d'appropriation des biens publics, de détournements de fonds publics, entre autres crimes contre le peuple, manifester contre la Coupe du Monde de la FIFA au Brésil est non seulement légitime – c’est également un devoir. Par conséquent, ne soyez pas intimidé par les menteurs et les discours de patriotisme aveugle, ou par les articles écrits par des journalistes et des intellectuels dont l'engagement réel est avec tel ou tel parti politique ou pour leur propre poche.

Les actions de la police contre les manifestations s'intensifient, un fait qui est devenu clair lors de la manifestation du 25 janvier, lorsque le manifestant Fabrício Proteus Chaves s’est fait tiré dessus à bout portant (le conduisant presqu’à la mort) par la police militaire. Cet acte lâche, qui est courante dans les bidonvilles et les périphéries du Brésil, nous met en état d'alerte pour de futures manifestations.

Ni la violence de la police, ni le discours mensonger de dénigrement ne nous arrêteront. Nous faisons partie de la population : nous nous battons pour le peuple et avec le peuple. Rien ne nous empêche de jouir du droit constitutionnel à manifester, notamment contre la Coupe du monde plongée dans la pourriture et les crimes - qui a même conduit à l'arrestation et à la mort de personnes qui ont souffert avec les déplacement brutaux ou le processus de « nettoyage » social.

Les manifestations contre la Coupe du Monde au Brésil représentent la lutte pour les intérêts du peuple et la défense de la dignité humaine, blessée par des lois d'urgence et le lâche processus de la construction de cette Coupe du Monde de la FIFA.

FRENTE INDEPENDENTE POPULAR – RJ / FRONT POPULAIRE INDEPENDANT – RIO DE JANEIRO

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