Le jeûne mortel des ouvrières de Latelec n’émeut pas les patrons français !
18e jour de la grève la faim.
Dans l’indifférence totale du gouvernement en place, de l’UGTT, de
l’ANC et d’une grande partie de la société civile, les ouvrières de SEA Latelec-Fouchana
risquent le tout pour le tout. Les négociations se mènent, jusqu’ici,
aux conditions des patrons français qui persistent à refuser la réintégration des ouvrières licenciées.
Fragilisée par ses problèmes de santé, Sonia Jebali voit sa santé se détériorer de jour en jour.
Le médecin m’a sommé, hier, d’arrêter ma grève de la faim en me prévenant que je risque une crise cardiaque ou l’arrêt d’un rein, à n’importe quel moment. En plus de mon anémie, je suis sous traitement pour une maladie auto-immune. Depuis deux semaines, j’ai arrêté ce traitement et mes lésions cutanées me font souffrir de plus en plus. Malgré tout ça, je ne vais pas arrêter la grève de la faim jusqu’à la réintégration des ouvrières dans leur usine. Sonia Jebali, déléguée syndicale et gréviste.
Déterminées, Sonia et ses camarades n’arrêteront pas la grève de la
faim, même après l’UGTT ait annoncé une grève générale dans la zone
industrielle de Ben Arous, les 16 et 17 juillet prochain. En fait, les
grévistes n’ont plus confiance dans ce syndicat qui les a lâchées, lors
des précédentes négociations, en signant pour valider leur licenciement.
« Pour le moment, on n’a pas réussi à trouver un compromis. Il n’y a pas assez de soutien à notre cause. Ainsi, le bureau régional exécutif de Ben Arous nous a rendu visite, seulement au dixième jour de la grève. Maintenant, je préfère garder les choses en main et continuer la grève pour maintenir la pression. Et je tiens tout le monde pour responsable, s’il m’arrivait malheur, conclut la déléguée syndicale.
C’est en 2005, avec l’implantation de Latelec en Tunisie,
que ces ouvrières ont été embauchées dans des conditions précaires. Non
seulement, leurs salaires mensuels ne dépassaient pas les 200 dinars
(bien au dessous du Smig tunisien qui est passé, en 2012, de 300 à 320
dinars), mais elles étaient, en plus, victimes de harcèlement moral et
sexuel, d’intimidations et de racisme. C’est ce qui les décide, en 2011,
s’organiser dans un syndicat qui a réuni la majorité de la main-d’œuvre
de l’usine. En contrepartie, les patrons français ont commencé à
déployer toutes les méthodes de pression imaginables pour diviser le
mouvement et faire taire les voix contestataires. Au bout de plusieurs
mois de lutte, les ouvrières ont réussi, en mai 2012, à obtenir gain de
cause en recouvrant une partie de leurs droits (augmentation de salaire,
payement des heures supplémentaires et couverture sociale), ainsi que
la réintégration des travailleurs qui ont été licenciés pour donner
l’exemple.
Beaucoup ignorent que la majorité des syndicalistes qui s’opposent à
l’exploitation des patrons finissent par être licenciés. Après quoi, la
liste des noms des « fauteurs de trouble » fait le tour des usines pour
intimider les ouvriers qui seraient, des fois, tentés de se révolter.
Pour l’heure, en attendant que la direction de l’usine réagisse, les
grévistes risquent à tout moment de succomber à leur jeûne mortel,
là-bas au local de l’UGET, non loin de la Kasbah, du Bardo et du
ministère des Affaires sociales.
On signalera encore une autre grève de la faim, celle d’un ouvrier de
la société Leman Industrie qui en est à son 15e jour de grève pour
revendiquer, lui aussi, son droit à la réintégration.
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